La plume qui panse-3

3 - Elle a fait face, dû s'adapter souvent. Changer de travail, déménager, tout en se battant contre lui, pour leurs enfants. Il la détestait tant. L'affront qu'elle lui a fait subir en partant, était impardonnable. Il lui avait dit, qu'il la ferait payer. Ce n'était pas une parole en l'air, elle a morflé. Salement morflé. Elle ne se reposait plus, enchaînait les journées et les nuits de travail, tentait d'être disponible un maximum pour ses filles. A force de lui marteler que tout était de sa faute elle a fini par le croire. Son éducation judéo-chrétienne ne l'aidait pas à briser ses chaînes. Et puis elle était tellement fatiguée, de se battre, de rédiger des courriers sur ses heures de sommeil, de réguler les nombreux rendez-vous pour le suivi de ses enfants curateur, psy, avocat. Un danse infernale où respirer devenait une option. Elle n'existait plus. Avait elle existé un jour ? Ses proches lui disaient en la voyant se démener, qu'elle aurait dû rester, et supporter sa vie.

Supporter, est-ce ça le but du couple? Se supporter? Devenir transparent au point de s'oublier? Peut-être, mais elle ne pouvait pas le vivre ainsi. Elle voulait exister peu importe le prix.

Elle a perdu une énergie folle à tenter de se défendre, tenter de montrer qu'elle valait mieux que ce qu'on disait d'elle. Tenté de lui arracher des lèvres sa responsabilité dans cette histoire, qu'elle assumait seule.

Il lui a tout reproché, tout, même ce qui n'existait pas. Il la dépeignait en rendant d'elle, l'image d'une femme qu'on a juste envie de détester. Même sa vie sociale il s'y en est pris. Au point où, ceux qui ne la connaissaient pas, commençaient à se méfier d'elle, avant de voir ce qu'elle valait. Elle a déménagé. Dire d'où elle venait était difficile au début. Elle rêvait de rester dans cet anonymat qu'elle découvrait dans sa nouvelle ville. Elle s'est refait une vie, des amis, invité ceux qui ne l'avaient pas quitté. La vie a repris petit à petit. Quand elle croyait presque toucher au bonheur, un courrier venait la réveiller et la sortir de ses douces illusions . Elle repartait alors en guerre, plutôt la fleur au fusil, mais parfois le mors aux dents. Les années ont passé ainsi.

Elle a tenté de refaire sa vie, avec un homme qui avait l'équivalent féminin comme "terrain de jeu". Solidaires, unis dans l'adversité, ils se sont oubliés, n'ont pas eu assez d'espace pour se construire une vie rien qu'à eux. Ils devaient protéger ces bambins bien trop jeunes pour se débrouiller seuls dans ce monde hostile. Et puis que de temps à réparer en coulisse les cœurs et les âmes de ces innocentes victimes. Les années difficiles ont eu raison de leur couple, et elle a recommencé seule, à mener tout son petit monde.

Pas riche, mais avec un bon job elle s'en sortait. Au point qu’elle a finit par penser que les années noires étaient derrière, qu'elle allait enfin tirer un trait et pouvoir penser à elle. Elle y croyait. Elle s'est mise à prendre du temps pour elle, a rencontrer des gens, à parler d'autre chose. Elle a vécu quelques mois comme portée par cet espoir que la chance tourne. C'était enfin son heure . Enfin le temps pour elle après toutes ces années à se démener pour les autres de penser à elle. Elle y croyait. Elle a ressorti son vélo, repris ses balades sur son deux roues qui la défoulait et lui faisait décompresser de ses semaines folles, elle a profité de l'été, s'offrant des baignades au lac ou à la piscine, des pique niques, des soirées entre amis... des fous rire. Tout semblait aller dans le meilleur des mondes, enfin.

E.R-laplume qui panse2013